L’Île-du-Temps

de Fabien Waksman


Concerto pour accordéon et orchestre symphonique

durée : 19 min / commande de Félicien Brut

création : octobre 2021, Auditorium de l’Opéra de Bordeaux (33)
avec l’Orchestre National de Bordeaux-Aquitaine, sous la direction d’Antonio Méndez

enregistrement : album « J’ai deux amours » paru en octobre 2022 chez Erato/Warner Classics
avec l’Orchestre National de Bordeaux-Aquitaine, sous la direction de Pierre Dumoussaud

Fabien Waksman a reçu la Victoire du Compositeur de l’année pour cette œuvre lors de la cérémonie des Victoires de la Musique Classique 2023, à Dijon. 

I. Que s’ouvrent les portes du Ciel !

II. Que paraisse Isis, Dame de Philae !

III. Que s’éveille Sothis en son horizon !


Le Concerto l’Île-du-Temps en quelques mots, par Fabien Waksman…

La « perle de l’Egypte ». C’est ainsi que l’on appelle aujourd’hui le temple d’Isis érigé il y a plus de 2500 ans sur la lointaine ’île de Philae. Les égyptiens anciens la nommaient iou rek, l’île-du-temps. Ils plaçaient ainsi son apparition aux instants premiers de la création du monde.

J’ai voulu dans ce concerto redonner vie à cette île temple fabuleuse. Chaque mouvement semble ainsi retracer un pan de l’histoire de Philae.

La pièce débute par l’ouverture spectaculaire des « Portes du Ciel », c’est-à-dire les portes du Naos, sanctuaire sacré au sein duquel repose la statue de la Déesse.  Nous pénétrons dans le monde des Dieux et suivons Isis en son voyage nocturne à bord de la barque solaire. Protectrice du dieu Rê, elle participe à l’équilibre du monde, la Maât si chère aux égyptiens, et permet au Soleil de renaître au jour. Le mouvement est conçu comme une suite d’épisodes contrastés, dans lesquels l’accordéon paraît tour à tour jouer le rôle destructeur du serpent Apophis, semeur de chaos, puis rejoindre l’équipage de la barque en se fondant avec l’orchestre. Le voyage s’achève par le retour lumineux du motif initial, symbole de la renaissance cyclique du soleil.

Le second mouvement s’inspire du rituel le plus spécifique au temple de Philae. Tous les dix jours, Isis rejoignait en barque l’île de Bigeh, située en face de Philae, pour se rendre à l’Abaton, tombe de son époux Osiris, où elle lui offrait une libation de lait destinée à le régénérer. Une musique irréelle évoque tout d’abord la sortie du temple de la statue de la déesse. Un long et doux chant escorte alors la Dame de Philae dans son trajet vers l’Abaton, qui s’achève par un rappel des sonorités initiales. Un thème de plus en plus inquiétant retentit d’abord aux cors puis s’étend à tout l’orchestre, suggérant les retrouvailles des deux amants divins et leur union secrète, invisible aux yeux des hommes. La déesse retourne enfin en son temple, bercée par la tendre mélodie entendue précédemment, pour finalement regagner sa demeure d’éternité.

C’est dans l’atmosphère de liesse de la fête du Nouvel An que débute le dernier mouvement. Evènement le plus marquant de l’année égyptienne, le Nouvel An coïncidait avec l’arrivée de la crue du Nil engendrée par la bienfaitrice Isis. Les égyptiens assimilaient en effet l’étoile Sothis (Sirius) au ba (âme) d’Isis, et c’est son lever héliaque à l’horizon du temple qui signalait l’arrivée prochaine de la crue. J’ai tenté dans ce mouvement d’imaginer la danse de plus en plus frénétique de la foule de fidèles amassés sur le parvis du temple, invoquant leur précieuse Dame de Philae. Le retour du thème central du second mouvement symbolise l’arrivée progressive de Isis-Sothis dont l’éclat finit par apparaître à l’horizon. Le temple de Philae devient à ce moment précis le lieu où l’ici-bas touche l’au-delà, le point de contact entre les hommes et les dieux. Un dernier élan orgiaque accompagne cet extraordinaire symbole de régénération du cycle de la vie.

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